Nouvelle année d'instruction libre #2
Me revoici pour la suite du billet précédent, avec plus de détails sur le fonctionnement de notre nouvelle année en IEF. Alors, concrètement, ça donne quoi ?
Tout d’abord, grande nouveauté cette année avec l’inscription des filles dans une école hors les murs. Il s’agit de Clonlara school, une école américaine de type Sudbury, qui propose un suivi à distance. Donc l’idée n’est pas du tout un cours par correspondance ou autre chose de ce type dans lequel nous aurions pu nous sentir coincées.
Donc que nous apporte cette inscription, puisque dans ce type d’école, les enfants sont libres de suivre leurs intérêts (ce que nous faisions déjà avant) ?
En effet, de ce point de vue-là ça ne changera pas beaucoup notre façon de fonctionner. Cependant nous bénéficions d’un suivi et d’une validation des acquis. Avec notre conseillère, nous allons voir comment valoriser ce que font les filles et de quelle manière faire entrer cela dans les attendus de fin de cycle de l’éducation nationale. Cela permet également aux filles de faire le point sur leur travail, ce qu’elles ont appris, les efforts qu’elles ont fourni et d’avoir un regard extérieur - et ça c’est un point important.
Clonlara propose une méthode (que nous sommes libres de suivre ou non, ou d’adapter à notre vision des choses) appelée La spirale des apprentissages. Elle est inspirée d’un livre Unleashed to learn que j’ai commandé, mais pas encore reçu. Cette méthode propose à l’enfant de se fixer des objectifs et de suivre une série d’étapes pour y parvenir. C’est un accompagnement intéressant pour développe l’autonomie et de bonnes habitudes de travail.
Je pense que cela donnera une nouvelle dimension à notre façon de faire et la valorisation de leur travail est à mon avis importante pour la motivation des filles — que j’ai senti baisser au cours de l’année dernière.
Chez Clonlara, en primaire, il y a simplement une validation des acquis qui se fait en partie par auto-évaluation de l’élève et le regard du parent. Pour le collège (High School) à partir de 14 ans, les enfants commencent à cumuler des crédits dans les différentes matières. Encore une fois, il ne s’agit pas de travailler par matière, mais de dispatcher le travail effectif de l’enfant dans les différents matières. En fin de cycle, s’il a cumulé assez de crédits, l’adolescent peut passer son High School diploma à distance (équivalent du BAC).
Voilà, ça c’est pour la principale nouveauté. Quant à notre manière de travailler, je ne pense pas qu’elle change réellement par rapport aux années précédentes, mais c’est dans l’organisation que tout se joue.
Pour le moment nous avons trouvé un fonctionnement qui convient aux filles. La mise en place du planning prend toujours un peu de temps et nous le faisons ensemble, sous forme de brainstorming et nous voyons ce qui en ressort. Je note les idées des filles et les miennes, et nous choisissons ce que nous voulons essayer. Si après coup, on se rend compte que ça ne convient pas, on ajuste.
Je m’aperçois que si je planifie trop en définissant à l’avance ce que nous ferons chaque jour, nous nous sentons vite dépassées, car il y a toujours des imprévus. On peut vite avoir le sentiment d’être constamment à la traine par rapport à ce qu’on avait prévu et ça n’est ni motivant ni gratifiant.
Dans ce cas, il faut moins planifier. Oui, mais… si je ne planifie pas assez, les filles tournent en rond, s’ennuient et se chamaillent et filent jouer dans leur chambre !! C’est marrant, c’est quand nous avons un planning plus ou moins consistant et structurant que les filles développement mieux leur autonomie et sont plus aptes à suivre leurs intérêts. Je ne sais pas trop comment l’expliquer, mais c’est comme ça.
Alors ce sont les filles qui construisent le planning comme ça ce n’est pas moi qui impose les choses. Elles décident d’une série de projets, de livres, de manuels à étudier et cela servira de base pour le planning. Nous avons aussi choisi ensemble une « boucle » de grands sujets et nous en traitons un par semaine (il y a Histoire, Géographie, Sciences, Anglais, Géométrie).
Par exemple j’ai proposé à Liv cette série de livrets pour les sciences et elle les aime bien. Elle a terminé celui sur l’énergie et va entamer la chimie. Je pourrais également lui proposer ce document de Carpe Diem si elle veut prolonger le sujet.
Ainsi chaque jour, elle font une partie de ce qu’elles ont prévu pour avancer en maths et en français (Émy par exemple a décidé de suivre la Kahn Academy pour les maths), ensuite nous attaquons la thématique de la semaine que nous affichons le lundi matin sur le planning et qui vaut pour toute la semaine. Après quoi, elles travaillent sur leur projet en cours : elles doivent avoir un projet, peu importe le sujet, sur lequel elles ont envie de faire des recherches et d’apporter des réponses à des questions. Pour l’après-midi nous improvisons en fonction des sorties et des envies. Si nous sommes à la maison, nous avons préparé une série de petites cartes avec des sujets parmi lesquels elles peuvent choisir si elles ne savent pas quoi faire : Poetry tea time, Wild Explorer club, Baking, Nature Study, Smart games, Hand craft…. (oui c’est en anglais, car nous ne faisons pas de leçons d’anglais, il est apporté par la conversation, la lecture et divers supports, dont le planning). Pour la semaine “Anglais” nous parlons, lisons des livres, nous écoutons des dialogues d’Assimil, travaillons sur Rosetta Stone.
À la fin des projets nous ferons le point, afin que les filles puissent s’évaluer. Il ne s’agit pas de mettre une note, mais de réfléchir à ce qu’on a fait : sont-elles contentes du résultat, qu’ont-elles appris, ont-elle envie d’aller plus loin ? Que feront-elles différemment pour le prochain projet ? C’est aussi l’occasion de raviver les connaissances acquises.
Voilà, c’est ainsi que se dessine notre planning et ce sont les filles qui le construise. Ça les motive.
De plus, cela apporte une notion de persévérance, de constance, car on essaie d’aller au bout de ses objectifs.Se fixer des objectifs et tenter de les réaliser est un bon apprentissage. Et quand cela peut se faire sans pression ni jugement, c’est encore mieux.
Le seul problème chez nous est la durée…
Au début de l’année, tout le monde est motivé, on a de beaux objectifs et on est sûr de les réaliser. Puis le temps passe, on ralenti, on oublie, on laisse aller… on laisse tomber nos objectifs et c’est dommage. J’espère que nous arriverons mieux à gérer cela cette année.
Autre problématique : concilier les profils d’apprentissage différents de mes deux filles (et encore, je n’en ai que 2 !).
Liv est une apprenante visuelle et auditive. Avec elle, je peux développer les supports visuels et lui fournir des livres à lire. Elle peut faire des courts résumés, prendre des notes. Elle emploie aussi énormément le dessin. Elle aime pouvoir étudier tranquillement, et elle est maintenant tout à fait capable de travailler seule.
Émy a un profil kinesthésique et également auditif. Elle a besoin de beaucoup de travaux pratiques, d’expériences et de bricolages. Elle aime bien utiliser l’ordinateur (ça la motive) et regarder des vidéos pratiques. Elle a besoin de sortir et bouger beaucoup. Elle ne tient pas longtemps à table, il faut faire avec ça et avec sa soeur qui a besoin du contraire.
Et bien, voilà un billet bien long que j’espère pas trop “sec”. J’ai le sentiment qu’avec une structure bien stable nous pouvoir jouir de plus de liberté et travailler plus sereinement. Et bien sûr dans toute cette organisation, il y aura comme toujours beaucoup de lectures à voix haute, des dessins et de sorties natures, et aussi des bons goûters et beaucoup de thé !